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L’utilisation d’outils d’IAg à l’Université Laval: entre exploration et prudence

Une étude l’Obvia a exploré l’usage de l’intelligence artificielle générative en enseignement supérieur. Dans cet article, découvrez les tendances, freins, perceptions et enjeux liés à l’intégration pédagogique de l’IA dans divers contextes du point enseignante et étudiant.

15 septembre 2025

Cet article vise à mettre en lumière quelques éléments-clés des résultats d’une étude effectuée par l’Obvia sur l’utilisation de systèmes d’intelligence artificielle générative à l’Université Laval. 

L’étude de l’Obvia, dont la collecte de données a eu lieu du 16 décembre 2024 au 17 janvier 2025 par l’envoi d’un questionnaire au corps professoral, au personnel enseignant et à la communauté étudiante, visait à documenter la manière dont la présence de systèmes d’IA générative influence les pratiques d’enseignement et d’apprentissage en enseignement supérieur. Les constats qui en ressortent incitent à explorer ces outils avec prudence, en tenant compte des enjeux pédagogiques, éthiques et d’intégrité intellectuelle en découlant.

Portrait du corps professoral et enseignant

Tendances générales

Près de 45% des membres du corps professoral et enseignant ayant répondu au questionnaire (522 répondantes et répondants) affirment utiliser des systèmes d’IA générative pour soutenir les activités d’enseignement.

On remarque certaines tendances générales:

  • Les hommes montrent des taux d’utilisation légèrement plus élevés (46,1% vs 43,6% pour les femmes)
  • L’utilisation des systèmes IA générative est relativement faible chez les moins de 30 ans (36,9%). Elle augmente progressivement pour atteindre son maximum chez les 50-60 ans (51%), puis diminue chez les 60 ans et plus (39,3%). Les taux des groupes intermédiaires (30-40 ans et 40-50 ans) se situent autour de 45 à 47%.
  • Certains domaines disciplinaires semblent associés à un plus grand taux d’utilisation, par exemple en sciences de l’administration (68,3%). L’utilisation de systèmes d’IA générative semble toutefois moins fréquente dans d’autres domaines, par exemple en sciences sociales (37,5%).
     

«L’enquête menée auprès de 522 membres du corps professoral et enseignant de l’Université Laval révèle une adoption encore timide mais stratifiée de l’IAgen» (p.10).

Types d’utilisation

Les tâches d’enseignement pour lesquelles l’utilisation de systèmes d’IA générative est plus fréquente sont :

  • L’assistance à la rédaction de documents (60,4%)
  • La génération d’exemples et d’exercices (53,6%)
  • La création de contenu pédagogique (38,7%)

 

Raisons justifiant la non-utilisation

Les raisons que les répondantes et les répondants mentionnent le plus fréquemment pour expliquer leur non-usage sont:

  • Un manque d’intérêt perçu (41,5%)
  • Une méfiance vis-à-vis les technologies et l’IA générative (30%)
  • Une méconnaissance des outils (29,3%)

L’équipe de recherche dénote par ailleurs des disparités quant aux freins mentionnés qui semblent être influencées le genre et la discipline enseignée. 

Perception de l’utilisation de systèmes d’IA générative faite par les personnes étudiantes

La perception générale des membres du corps professoral et du personnel enseignant de l’utilisation des systèmes d’IA générative faite par les personnes étudiantes se décline ainsi:

  • Perception très positive à 6,5%
  • Perception plutôt positive à 31,6%
  • Perception neutre à 32,4%
  • Perception plutôt négative à 22,8%
  • Perception négative à 6,7%

La perception semble donc naviguer entre perception positive, neutre et négative, sans tendance forte qui se dégage. Selon l’équipe de recherche, «[c]ela pourrait suggérer un besoin de dialogue et d’encadrement pédagogique autour de ces pratiques» (p. 6).

Les risques perçus les plus fréquemment mentionnés concernent le plagiat et la tricherie (89% des répondantes et répondants étaient parfaitement ou plutôt d’accord avec l’existence de ces risques). D’ailleurs, une proportion considérable de personnes enseignantes (65,7%) mentionnent avoir revu leurs modalités d’évaluation pour limiter les risques d’infractions relatives aux études.

Défis et attentes

Plusieurs risques sont perçus en lien avec l’utilisation de systèmes d’IA générative dans l’enseignement:

  • Préoccupations éthiques (64,6%)
  • Manque de formation (45,8%)
  • Difficulté à trouver le bon outil d’IA pour la tâche à accomplir (40,4%)
  • Problèmes techniques (18%)
  • Difficultés d’utilisation (16,3%)
  • Résistance des étudiants (6,5%)

Par ailleurs, en raison de l’utilisation des outils d’IA par les personnes étudiantes, une proportion de près de 43,5% des répondantes et des répondants disent voir la présence des systèmes d’IA générative comme une opportunité d’innovation pédagogique. Cette posture d’ouverture est davantage observée chez les personnes ayant entre 10 et 15 ans d’ancienneté (53,1%).

Enfin, quoique les répondantes et répondants mettent en place un certain nombre de stratégies d’intégration et de régulation dans leur contexte d’enseignement, par exemple une mention au plan de cours (55,4%), la formation et la sensibilisation des personnes étudiantes (50,8%) et la surveillance accrue des travaux (38,7%), une forte majorité, soit 85,2%, souhaiterait un encadrement institutionnel ou facultaire de l’utilisation de l’IA générative dans l’enseignement.
 

«L’enjeu n’est plus de savoir si l’IAgen transformera l’enseignement supérieur, mais comment accompagner cette transformation pour qu’elle serve l’excellence pédagogique plutôt que de la compromettre.» (page 10)

Portrait de la communauté étudiante

Tendances générales

Sur un total de 4628 personnes étudiantes ayant complété le questionnaire, 56,4% disent utiliser des systèmes d’IA générative. Certains facteurs démographiques et liés au cycle d’étude semblent influencer les pratiques:

  • Les personnes de moins de 25 ans adoptent proportionnellement davantage les systèmes d’IA générative (63,3%) que les personnes plus âgées (par exemple, 43,7% des personnes de 35-49 ans disent les utiliser).
  • Les personnes étudiant aux cycles supérieurs semblent plus susceptibles d’utiliser les systèmes d’IA générative, de même que les personnes qui étudient à temps plein
  • La formule d’enseignement semble influencer le taux d’utilisation des systèmes d’IA générative; le contexte de la formation hybride est associé à un plus haut taux d’utilisation par les personnes étudiantes (66%) que le contexte de formation en présence (58,1%)
  • Le taux d’adoption des personnes qui s’identifient comme femmes dans le questionnaire est légèrement inférieur (45,5% vs 47,2% pour les hommes)
  • Les personnes ayant le statut de citoyennes au Canada présentent un taux d’adoption inférieur (55%) que les personnes résidentes permanentes ou détentrices de permis d’études (64,8%)
     

«[Les membres de la communauté étudiante] expriment un sentiment de compétences minimales pour utiliser les outils d’IAgen, s’inquiètent de l’impact environnemental de ces technologies, et soulignent la nécessité d’adapter les méthodes d’évaluation.» (p. 8)

«La disparité dans l’adoption des outils d’IAgen soulève d’importants enjeux d’équité et d’inclusion : comment garantir que l’ensemble des personnes étudiantes bénéficient des mêmes conditions de réussite, qu’elles utilisent ou non les technologies d’IAgen?» (p. 8)

Types d’utilisation

L’analyse des réponses révèle que le système d’IA générative le plus utilisé, et ce, de façon marquée, est ChatGPT de OpenAI (92,1%). Suivent Copilot de Microsoft (28,6%) et Gemini de Google (14%).

Les quatre principales motivations des personnes étudiantes pour expliquer l’utilisation de systèmes d’IA générative sont:

  • Comprendre certains sujets (61,4%)
  • Résumer des textes ou en trouver les idées principales (50,7%)
  • Améliorer les capacités rédactionnelles (46%)
  • Générer des idées pour démarrer un travail (44,9%)

Non-utilisation de systèmes d’IA générative

Les deux raisons que les répondantes et les répondants mentionnent le plus fréquemment pour expliquer leur non-utilisation sont:

  • Le désir de préserver l’autonomie intellectuelle (65,9%)
  • L’absence de perception d’un besoin (64%)

L’équipe de recherche dénote que les personnes étudiantes identifient des freins secondaires, tels que la crainte que l’utilisation de systèmes d’IA générative ne soit pas conforme aux objectifs d’enseignement, la crainte de commettre une infraction relative aux études, le manque de connaissances ou d’encadrement, les préoccupations environnementales. 

Par ailleurs, l’analyse des questionnaires par faculté (donc en fonction du contexte disciplinaire) démontre des écarts significatifs de taux d’utilisation des systèmes d’IA générative en fonction de la motivation invoquée pour expliquer cette utilisation. Par exemple, les personnes étudiantes de la Faculté des sciences et de génie utilisent des systèmes d’IA générative dans une proportion de 75,3% pour mieux comprendre certains sujets, taux qui se situe à 49,5% pour les personnes étudiantes de la Faculté des sciences de l’éducation. Selon les membres de l’équipe de recherche ayant analysé les résultats de l’enquête, « [c]es différences suggèrent la nécessité de considérer les spécificités disciplinaires pour intégrer les utilisations des outils d’IAgen selon ces particularités, invitant ainsi les unités académiques à se doter de cadres d’usage contextualisés pour ces technologies » (p. 5).

Perception de l’utilisation de systèmes d’IA générative et du niveau de compétences à les utiliser

La perception de la valeur pédagogique des systèmes d’IA générative est significativement plus élevée chez les personnes utilisatrices (54,6%) que chez les personnes qui ne les utilisent pas (11,2%). Les personnes utilisatrices sont aussi plus confiantes en leurs capacités à utiliser ces systèmes et en leurs retombées positives sur le plan des bénéfices psychologiques, de l’engagement et des relations avec le personnel enseignant. 

Les préoccupations éthiques sont quant à elles davantage partagées par les deux groupes, notamment l’importance de valider les contenus générés par les systèmes d’IA générative ou le fait que l’utilisation non autorisée de ceux-ci dans les activités d’évaluation sommative constitue une forme de tricherie.

Attentes

Enfin, en cohérence avec les réponses données par les membres du corps professoral et du personnel enseignant, les personnes étudiantes souhaiteraient davantage de balises claires favorisant des usages éthiques et responsables des systèmes d’IA générative.
 

Aller plus loin

Pour avoir accès à des données plus complètes et aux éléments d’interprétation proposés par l’équipe de recherche, nous vous invitons consulter les notes complètes publiées par l’Obvia :

Paquelin, D., Tendeng, M.-L., Djieufack, E.-B. et Kropf, V. (2025). Portrait de l’utilisation de l’IAgen par le corps professoral et enseignant de l’Université Laval. Obvia. https://doi.org/10.61737/SECP3363

Paquelin, D., Tendeng, M.-L., Djieufack, E.-B. et Kropf, V. (2025). Portrait de l’utilisation de l’IAgen à l’Université Laval. Obvia. https://doi.org/10.61737/NWLY1707